Intervention 2006

Forum des solutions pour le développement
des musées, sites patrimoniaux et équipements culturels

ARCHIVE FORUM PTOLÉMÉE - 23 & 24 octobre 2006.
Cité des Sciences et de l'Industrie, Paris
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Atelier A2 : Labels culturels et décentralisation : bilan et perspectives
L'Etat et de nombreuses collectivités locales ont créé des labels culturels identifiant un patrimoine particulier ou thématisé (les villes et pays d'art et d'histoire). Ces labels permettent aux visiteurs d'être éclairés sur ce qui les attend lorsqu'ils choisissent de visiter telle région ou telle ville. Au-delà d'une simple estampille, ces labels doivent-ils se multiplier et densifier leurs réseaux ?

Président :
Thomas Compère-Morel, directeur du développement et de la diffusion, Cité nationale de l'histoire de l'immigration, Paris

Expertise label Ville et Pays d'art et d'histoire :
• Benoît Dusart, adjoint au chef du bureau de la diffusion, Direction de l'Architecture et du Patrimoine, Ministère de la culture et de la communication
Pascale Mottura, consultante en ingénierie culturelle, tourisme et communication, Paris
Autres expertises :
• Association nationale des sites remarquables du goût : Murielle Bousquet, directrice
• Durancia, musée des radeliers de la Durance : Denis Furestier, président de l'association des radeliers de la Durance et maire adjoint à Embrun, Laure Confavreux-Colliex, chargée de projet LORDculture, Paris
• Tourisme et handicap : Claudine Desvignes, Planeth Consultants, Paris

Résumé de l'intervention de Pascale Mottura :
Consultante depuis 17 ans, je suis sollicitée depuis 3 ans par des collectivités territoriales dans le cadre d’appels d’offres portant sur une assistance à l’élaboration de leur candidature au label Ville ou Pays d’art et d’histoire. J’ai d’abord travaillé pour la Ville de Saintes et le Pays de Saintonge romane qui souhaitaient une évaluation de la gestion du label à Saintes depuis 15 ans, dans la perspective du transfert du label au Pays. Je viens de terminer une mission d’un an sur la candidature du Pays du Charolais-Brionnais, en Bourgogne du Sud. Je suis actuellement assistante à maître d’ouvrage pour la candidature de la Communaupole de Lens-Liévin située dans l’ancien bassin minier du Pas-de-Calais. Enfin, la Ville de Millau vient également de me missionner pour un accompagnement de sa candidature.
Ces demandes de conseil et d’assistance dénotent la charge que représente l’élaboration d’une candidature au label VPah aujourd’hui, notamment pour des collectivités qui ne possèdent pas en interne les compétences ad hoc à mobiliser sur plusieurs mois. On est loin en effet des dossiers labellisés voici 10 ans (voire encore 5 ans) dans lesquels le projet de la Ville ou du Pays ne tenait qu’une vingtaine de pages, faisant suite à une compilation descriptive du patrimoine local de 150 pages environ. Désormais, le dossier doit être l’expression d’un projet politique fort et structuré autour du label et s’inscrire dans le projet global de la collectivité. Comportant en général deux volumes, il résulte d’une démarche participative longue associant tous les acteurs institutionnels et associatifs du territoire candidat dans les domaines de la culture, du tourisme, de l’urbanisme, de l’action éducative, etc. Il s’agit de missions très techniques où le consultant évolue dans un cadre administratif rigide.


Pour les hommes politiques que je côtoie à l’occasion de ces missions, maires, présidents de Pays ou de communautés d’agglomération, la finalité première de ce label n’est pas touristique. La labellisation vise avant tout une réappropriation du patrimoine par les habitants, et particulièrement par les jeunes, afin d’en faire les meilleurs ambassadeurs de leur territoire. Plus encore, le label est perçu comme un outil de marketing territorial. C’est réellement le cas en Charolais-Brionnais, zone rurale fragilisée (déclin démographique, perte de l’emploi industriel, difficultés du monde agricole) où les élus locaux veulent maintenir les jeunes sur place et attirer de nouveaux habitants et de nouvelles entreprises. C’est aussi le cas de la communauté d’agglomération de Lens-Liévin, « un pays millénaire qui paraît cent ans » puisque détruit à 99 % pendant la première guerre mondiale, qui dispose d’un poids démographique important (250 000 habitants) et d’une population jeune (28,9% de la population a moins de 20 ans) mais qui reste marquée par un contexte économique et sociologique difficile.

Bien au-delà d’un estampillage culturel, le label Ville et Pays d’art et d’histoire salue un engagement pour une politique sociétale proactive en faveur de la culture, du patrimoine et du cadre de vie. Le terme « label » est-il encore le mot juste pour désigner cet outil structurant de territoires regroupant parfois plus de cent communes, ce dispositif qui va bien dans le sens de la décentralisation et de la reconnaissance du rôle majeur joué par les collectivités territoriales en matière de patrimoine ? L’appellation « art et histoire » paraît tout autant réductrice aujourd’hui pour ce label qui tient compte de la mémoire locale, du patrimoine du quotidien, et qui donne une place de plus en plus importante aux opérations d'aménagement et d'urbanisme, à la qualité architecturale, aux paysages.
L’organisation de cet atelier qui associe différents labels culturels à celui de VPah traduit peut-être une compréhension partielle de ce label, non appréhendé dans toutes ses dimensions actuelles même par des professionnels de la culture. Une campagne de communication sur l’évolution profonde de ce label vieux de 21 ans (et même de 30 ans si l’on remonte à la politique Ville d’art) serait utile.

Les territoires candidats étant confrontés à une rapide montée en puissance du niveau d’exigence de la Direction du Patrimoine et du Conseil national VPah, il serait bon qu’un nouveau mode d’emploi soit diffusé, précisant aux élus quel montage de projet et quels contenus du dossier sont à même de recevoir un avis favorable du Conseil national. Ici, une clarification apparaît souhaitable sur la hiérarchie des rôles et prérogatives des DRAC, du Bureau national et du Conseil national quant à la sélection et modalités de labellisation des candidatures.

Pour terminer, le label « Ville et Pays d’art et d’histoire » est un label précieux puisqu’il suscite de toute évidence des jeux de pouvoir à la fois au sein de ses autorités de tutelle et au coeur de la vie politique sur les territoires.